Cassandre dit la vérité
La semaine passée je me suis fait traiter de Cassandre par un député radical lorsque je défendais le principe de précaution à l’Assemblée constituante genevoise. Il prétendait que les écologistes exagèrent, et qu’ils annoncent des catastrophes imaginaires. Cette accusation repose sur une méconnaissance de la mythologie grecque.
Mon ami André Hurst, professeur de grec ancien à l’université de Genève me confirme l’histoire suivante. Apollon veut séduire Cassandre, la plus belle des Troyennes, et lui demande de coucher avec lui. Cassandre feint d’accepter, à la condition qu’Apollon lui accorde le don de prophétie. Très amoureux, le dieu s’exécute, mais une fois gratifiée de ce don de prophétie, Cassandre se refuse à lui. Apollon est vexé, et il veut la punir. Comme il ne peut pas lui enlever le don qu’il vient de lui accorder, il ajoute qu’elle sera bien capable de prévoir l’avenir, mais que personne ne la croira.
Donc lorsqu’on traite un écologiste de Cassandre, c’est qu’il dit la vérité, mais que les dieux de notre société, c’est-à-dire l’appât du gain, la consommation, la compétition et la croissance empêchent les gens de le croire. C’est pour cela que nous réagissons trop tard aux malheurs qui nous arrivent par notre propre faute. Au lieu de prévenir les pollutions, les changements climatiques et la dégradation de la nature, nous tergiversons et nous devons ensuite essayer, trop tard, de guérir le mal, ce qui est beaucoup plus difficile et plus coûteux.