Tribune de Genève Janvier 2007
Suisse - Retiré à Russin depuis plus d'un an, l'ex-secrétaire d'Etat à l'Environnement savoure sa quiétude de gentleman-farmer. Tout en gardant un œil sur la campagne électorale.
antoine grosjean Publié le 17 janvier 2007
Sa capacité d'émerveillement devant le spectacle de la nature semble aussi intacte qu'au premier jour. Quand il raconte sa rencontre inopinée avec une harde de sangliers, lors d'une balade la nuit du solstice d'hiver, on perçoit une intonation de joie candide dans la voix de Philippe Roch. Le Genevois a retrouvé la sérénité depuis qu'il a quitté sa fonction de secrétaire d'Etat à l'Environnement, il y a un peu plus d'un an, pour se retirer dans son domaine de Russin. «Je ne m'énerve plus, je suis beaucoup plus détendu», confirme-t-il en passant ses doigts dans l'épaisse laine d'un de ses moutons roux du Valais (une race rare que son élevage contribue à préserver).
«Je n'ai plus de réveille-matin», se félicite-t-il dans un sourire malicieux. Mais il ne fait pas la grasse matinée pour autant. Après quelques instants de méditation au pied de son arbre et les soins prodigués à ses bêtes (une vingtaine de moutons, quelques poules et un poney) la première partie de la journée est consacrée aux travaux de l'esprit: rédaction d'articles, de sa chronique pour l'Illustré , préparation de conférences, écriture. L'après-midi est voué à la nature: jardinage, balades, observation de la faune. «J'ai trouvé un coin à castors, j'y vais régulièrement pour essayer de les voir s'attaquer aux arbres.» Aux quatre coins du monde Bref, l'homme est heu-reux! «Je ne regrette absolument pas mon choix, j'ai une vie intérieure plus riche maintenant.» Et des envies plein la tête. Il aimerait élever des chevaux franches-montagnes, des chèvres bottées, des cochons laineux, éventuellement des oies, le tout dans une sorte de ferme pédagogique dédiée aux espèces rares. Dans ce but, l'ancien haut fonctionnaire fédéral recherche un domaine agricole plus vaste que le sien. Puis il y a les projets d'écriture: un recueil de pensées écologistes en gestation ou encore un «petit ouvrage philosophique qui décrirait ma spiritualité naturaliste». Mais, depuis un an, Philippe Roch n'a pas fait que se pâmer devant la beauté de la nature, loin s'en faut. Devenu consultant indépendant, il a aussi rempli de multiples mandats (pour des universités, pour l'ONU) qui l'ont mené d'Albanie au Sri Lanka, en passant par le Cameroun, le Kenya, et le Liban. Ainsi qu'à la frontière irano-afghane, où il préside des négociations en vue de la résolution d'un conflit lié à l'eau. Et il a rejeté nombre de propositions, parfois très alléchantes. «J'ai reçu des téléphones du monde entier pour m'encourager à être candidat à la direction du Programme des Nations Unies pour l'environnement. J'ai beaucoup hésité avant de dire non. Etre le Monsieur environnement du monde, c'était tout de même tentant.» Pas de retour à Berne en perspective En revanche, le démocrate-chrétien n'a pas hésité une seconde quand le PDC genevois l'a sollicité pour être candidat au Conseil des Etats, lors des élections fédérales de l'automne prochain. «C'est clairement non!» Philippe Roch avait déjà refusé de briguer le siège de Carlo Lamprecht au Conseil d'Etat genevois en novembre 2005. «Mon rêve serait plutôt d'être comme un conseiller qu'on vient chercher quand on en a besoin.» Il est ainsi en contact régulier avec la conseillère fédérale démocrate-chrétienne Doris Leuthard et le président du PDC suisse Christophe Darbellay. D'ailleurs, il rédige actuellement un rapport sur le programme du parti en matière de développement durable. En Suisse, comme en France, l'environnement est devenu un enjeu majeur en cette année électorale. Mais le PDC est-il vraiment si vert que cela, lui qui affirmait récemment être le premier parti écologiste de droite? Un titre que lui dispute le Parti radical. «Certes, le PDC n'est pas encore le parti leader en Suisse en termes d'écologie, mais je me sens de mieux en mieux accueilli avec mes préoccupations», assure Philippe Roch. «En revanche, le Parti radical suisse, lui, est vraiment anti-écolo. Qu'ils montrent seulement ce qu'ils ont fait dans ce domaine!» Sincère ou non, cet intérêt des politiques pour l'environnement est selon lui une bonne chose. N'écrivait-il pas récemment dans une de ses chroniques: «En démocratie, c'est le peuple qui montre le chemin. Les politiciens suivent.»?
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