Je suis souvent interpellé quant à la responsabilité du Christianisme dans la crise écologique actuelle à cause du verset de la Genèse qui commande à l’humanité de remplir et soumettre la Terre. Il y a bien d’autres passages de l’Ancien Testament qui célèbrent la beauté de la Création et la responsabilité de l’être humain. Déjà le deuxième récit de la Genèse le place dans le jardin d’Eden pour le cultiver et le garder. Le Psaume 103 célèbre les sources, les arbres et les oiseaux et le Psaume 148 exprime la gratitude pour les étoiles, la lune, les arbres et les animaux sauvages, prélude à François d’Assise, repris tout récemment par le Pape François. La sacralisation de la Création trouve son accomplissement dans l’acte rédempteur du Christ qui s’adresse à l’ensemble des créatures : Paul écrit aux Romains : « Toute la création gémit dans les douleurs de l’enfantement, attendant d’être libérée, elle aussi, de la servitude et de la corruption pour entrer dans la liberté et la gloire des enfants de Dieu (Rm 8, 19-22). C’est dans ce sens que le Pape Jean-Paul II parlait d’eucharistie cosmique.
Le christianisme apporte un autre élément essentiel à un comportement écologique, c’est son message de paix, d’humilité et de sobriété, une sobriété joyeuse puisque le Christ prend plaisir à partager un bon repas arrosé de bon vin. Ce message est un pilier de la nécessaire transformation de notre société consumériste et gaspilleuse. Le Pape François a produit une magnifique synthèse de l’écologie chrétienne dans son encyclique à valeur universelle « Laudato Si » qui nous invite à revitaliser les composantes sacrées et écologiques du Christianisme, à réenchanter le monde, à replacer l’humain au cœur de la Création, à reconnaitre la dignité de chaque créature et célébrer la fraternité entre tous les êtres vivants : « Tout l’univers matériel est un langage de l’amour de Dieu, de sa tendresse démesurée envers nous » (84). Conscient des liens qu’il y a entre destruction de l’environnement, matérialisme, pauvreté et perte de sens le Pape François en appelle à une « conversion écologique » et une « écologie intégrale ».
Ce n’est donc pas le christianisme qui est responsable de la crise écologique actuelle, mais au contraire la déchristianisation, le positivisme hérité du XIXe siècle qui exclue toute dimension spirituelle et qui réduit le monde à une ressource matérielle au service d’une humanité débridée qui fuit son indigence spirituelle dans une course effrénée aux consommations futiles.
Philippe Roch
ECHO magazine 13 octobre 2016